L'irrigation concerne près de 15 % des exploitations agricoles, environ 6 % de la SAU (1,5 million d'hectares) en France et toutes les espèces cultivées : céréales (comme le maïs), oléo-protéagineux, cultures fourragères, légumes de plein champ mais aussi vigne et fruits… Que l’équipement arrose en surface, par aspersion ou par micro-irrigation, chaque stratégie doit être construite sur un bilan hydrique élaboré. Celui-ci prend en compte la nature du sol, la variété et les prévisions de stress hydrique. Mais la base doit rester le besoin en eau de l’espèce, qui varie au cours de ses différentes phases de développement. Focus sur cinq cultures de premier plan.
SOMMAIRE
Irrigation du maïs : des besoins en eau ciblés
Pommes de terre : de l'eau mais pas trop
Betteraves : l'eau et le sucre
Blé tendre et blé dur de printemps : l'irrigation productive
Irrigation du maïs : des besoins en eau ciblés
Le maïs réclame environ 550 mm d’eau au total. Il traverse deux phases de forte sensibilité au stress hydrique au cours de son cycle : du stade "fin montaison" jusqu'à la floraison femelle et, quinze jours plus tard, au remplissage des grains. Dans les sols qui retiennent le moins l'humidité, l'évapotranspiration pendant ces deux périodes peut atteindre 6 mm par jour donc rendre nécessaire l’apport de 18 à 20 mm d’eau tous les trois jours. En plus des pivots et enrouleurs, la dernière décennie a vu apparaître et se développer deux nouvelles techniques d'irrigation : le goutte à goutte de surface et le goutte à goutte enterré. Ces systèmes de micro-irrigation promettent jusqu'à 80 % d'économie d'énergie et près de 30 % d'économie d'eau, les pertes par évaporation étant limitées et la pénétration de l'eau dans le sol optimisée.
Pommes de terre : de l'eau mais pas trop
Facteur de régulation du rendement et de maîtrise de la qualité, l'irrigation de la pomme de terre doit cependant prendre en compte son besoin de 500 à 700 mm sur les 120 à 150 jours de son cycle. Décisive pour la valorisation de la production, l'irrigation est délicate à mettre en œuvre. Le manque ou l'excès d'eau à des stades clef de la culture seront, dans un cas comme dans l’autre, préjudiciables. Du stade de la levée à la tubérisation (formation des tubercules), la pomme de terre est sensible au stress hydrique et réclame un apport régulier, de l’ordre de 20 mm par semaine. La croissance des tubercules nécessite ensuite un volume d'eau au moins égal mais, à mesure que le système racinaire se déploie, et que l'on approche de la maturité, le besoin décroît. En effet, un excès d’eau en fin de culture pénalise la formation de la matière sèche et favorise le développement de maladies.
Christophe PARENT, Céréalier en Seine-et-Marne (77) :
« Quand on cultive des pommes de terre, on a souvent tendance à ne pas assez arroser ou à trop arroser. Il est très difficile de savoir la bonne quantité d'eau à apporter. Dans les 2 cas les conséquences sont importantes. S'il n'y a pas assez d’eau, les pommes de terre ne seront pas de bonne qualité. Et s'il y a trop d'eau, le risque c'est d'avoir des maladies de tubercules ou pourritures.
L'irrigation sur pommes de terre est assez technique. Quand j’arrose sur cette culture, je dois prendre en compte le nombre de jours que l’on met pour faire mon tour d’eau, les besoins en eau de la culture suivant son stade (tubérisation, grossissement…), la capacité d'eau dans le sol, les pertes par évaporation la journée. Bref, sur certaines périodes critiques (absence de pluie et fortes chaleurs comme en ce mois de mai), il est très difficile d’être technique et d'anticiper nos apports d’eau pour éviter de courir sans arrêt.
Pour m'aider à trouver le bon équilibre en eau, j'ai une station météo connectée (Météus) afin de suivre les historiques de pluie sur mes parcelles (surtout celles éloignées) et l'évapotranspiration en temps réel. Je consulte également beaucoup les prévisions météo de l'application pour prendre mes décisions. En complément, je dispose d'une sonde d'irrigation que j'ai positionnée sur une parcelle de pommes de terre. Ainsi chez moi, depuis mon ordinateur, je peux suivre la capacité d'eau dans le sol sur mes parcelles. Sur le graphique, un seuil haut et bas m'aide à savoir si la capacité d'eau est insuffisante pour la croissance de ma plante ou si au contraire elle trop importante suite à une irrigation suivie d'un orage par exemple. J'essaie ainsi d'être toujours entre les 2, soit dans la zone verte.
Suivi de l'évolution de la capacité d'eau dans le sol via la sonde d'irrigation Météus
Cette sonde est pour moi un grand confort. J'ai juste à regarder où se situe ma courbe par rapport au seuil haut et bas, je n'ai pas besoin de me déplacer. Cela me permet d’avoir une meilleure organisation car je suis plus dans l’anticipation. Je sais quand je vais recommencer à irriguer après chaque pluie.
Cela me permet aussi de pouvoir me justifier si je suis pointé du doigt. L’irrigation n’est pas toujours bien vue par tout le monde. Là, je peux montrer que j’irrigue seulement quand c’est nécessaire pour ma plante et que je ne fais pas ça au doigt levé. J’optimise la ressource en eau. »
Betteraves : l'eau et le sucre
La betterave sucrière, dont le besoin en eau est estimé à 600 mm, compte parmi les cultures qui ne peuvent faire l'économie d'une bonne irrigation en cas de pluie insuffisante. Une sécheresse prolongée génère, en effet, jusqu’à 50 % de perte de rendement et complique l’extraction du sucre. Dans les sols à faible réserve hydrique en particulier, l'irrigation par aspersion (pivots et rampes) est privilégiée. Elle devra intervenir de manière précoce, en début de cycle et devient inutile à partir de la fin août. La betterave supporte bien les épisodes secs en fin de cycle. Une irrigation tardive se révèle même pénalisante pour la richesse de la racine.
Blé tendre et blé dur de printemps : l'irrigation productive
De 1,7 à 2 q/ha pour un apport de 10 mm ! Le rendement gagné par l'irrigation du blé tendre et du blé dur de printemps est significatif. Cette "productivité de l'irrigation", comme disent les spécialistes, profitera surtout aux exploitations des régions Sud, Centre – Val de Loire, Occitanie, Nouvelle Aquitaine et Pays de la Loire, en sols superficiels. En sols profonds, les apports d’eau ne s'imposent pas. Suivant les régions et la météo, le nombre de passages oscille entre 1 et 4. Moins ils sont nombreux, plus ils seront tardifs pour ne pas pénaliser la culture par la formation précoce de végétation et à défaut d’un apport suffisant aux stades suivants. L'enrouleur et le pivot sont privilégiés pour apporter 100 m3/ha à chaque passage.
Comme Christophe, vous souhaitez mieux adapter vos apports en eau sur vos cultures ?