Faire déguster au domaine peut être une formidable opportunité de renforcer sa relation client et d’en créer de nouvelles. Mais pour éviter les mauvaises expériences, mieux vaut respecter quelques règles.
D’après Vin et Société, la dégustation de vin est « une opération consistant à juger de la qualité d’un vin à partir des impressions qu’il provoque à l’odorat et au goût ». Pour l’organiser au domaine, quelques règles s’imposent.
Sommaire :
Quel est l'objectif de votre dégustation de vin ?
Choisir un thème
Matériel : ne rien oublier pour le jour J
Echantillons et fiches techniques
Le processus de dégustation
Que dit la loi ?
"Les erreurs à éviter"
Quel est l'objectif de votre dégustation de vin ?
Pour un vigneron, l'intention de faire découvrir ses vins à des clients potentiels est un moment crucial qui nécessite une préparation minutieuse. L'objectif principal de cette dégustation est de mettre en valeur les qualités uniques de ses vins, en soulignant leur origine, leur méthode de vinification, et leur potentiel de garde.
C’est aussi une occasion d’établir un lien direct avec le consommateur, en partageant l'histoire du vignoble, les spécificités du terroir et les pratiques agricoles qui distinguent ses produits. Une telle dégustation peut également viser à éduquer les clients sur les caractéristiques sensorielles du vin, en les guidant à travers les arômes, les saveurs, et les textures qui caractérisent chaque cuvée.
Enfin, elle sert à évaluer la réception du marché face aux vins présentés, fournissant ainsi des retours précieux pour ajuster les futures productions ou stratégies de marketing. Chaque verre servi devient alors un ambassadeur du savoir-faire et de la passion du vigneron, une invitation à partager une expérience gustative mémorable .
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Choisir un thème
Le choix du thème de la dégustation est une étape fondamentale qui oriente l'ensemble de l'événement. Ce thème peut être axé sur divers aspects tels que le type de cépages, l'année de millésime, les méthodes de vinification, ou encore une comparaison entre différentes régions viticoles. Par exemple, un vigneron pourrait opter pour un thème centré sur les vins bio et biodynamiques pour mettre en avant ses pratiques agricoles durables et écoresponsables.
Autre possibilité, choisir de présenter une verticale de millésimes, permettant aux participants de découvrir comment certains vins évoluent avec le temps et comment les variations climatiques annuelles influencent les caractéristiques du vin. Le choix du thème peut également être guidé par les préférences et intérêts des clients potentiels, en mettant l'accent sur les vins qui représentent le mieux le terroir ou qui sont les plus susceptibles de captiver leur palais.
Quel que soit le thème choisi, il doit inviter à l'exploration et à la découverte, enrichissant ainsi l'expérience gustative tout en éduquant subtilement le dégustateur sur la complexité et la richesse du monde vinicole .
Matériel : ne rien oublier pour le jour J
Pour organiser une dégustation de vin réussie, le choix du matériel est tout aussi important que la sélection des vins eux-mêmes. Le vigneron doit s'assurer de disposer de tout le nécessaire pour mettre en valeur ses crus dans les meilleures conditions possibles :
- Verres à dégustation : Des verres appropriés sont indispensables. Il est recommandé d'utiliser des verres transparents, en cristal ou en verre de haute qualité, pour ne pas altérer les arômes et saveurs du vin. Les verres doivent être adaptés au vin que vous faites déguster (rouge, blanc, pétillant...).
- Crachoirs : Même si tous les vignerons n’en utilisent pas, il est essentiel d’en fournir. Les crachoirs permettent aux visiteurs de goûter plusieurs vins sans en ressentir les effets de l'alcool, surtout lors de dégustations comprenant de nombreux échantillons.
- Eau et pain : Offrir de l’eau et du pain ou des biscuits natures entre les dégustations est essentiel pour nettoyer le palais. Cela aide à éliminer les résidus de goût d'un vin avant de passer au suivant, garantissant ainsi une appréciation plus précise de chaque échantillon.
- Un espace dédié et bien préparé : L'ambiance de la dégustation joue un rôle non négligeable. Le vigneron devrait organiser la dégustation dans un lieu calme et accueillant, idéalement avec une vue sur les vignes ou dans un espace de cave typique, où les participants peuvent se sentir connectés à l'origine du vin.
- Température de service adéquate : Assurer que les vins soient servis à la température idéale est primordial. Un réfrigérateur ou un refroidisseur à vin doit être à disposition pour ajuster la température des vins blancs et rosés, tandis que les rouges devraient être tempérés à une température qui en révèle pleinement les arômes.
- Fiches d'information ou de dégustation : Préparer des fiches pour chaque vin présenté est une excellente façon d’enrichir l'expérience. Ces documents devraient inclure des informations sur le cépage, la région, le processus de vinification, les notes de dégustation attendues et peut-être des suggestions d'accords mets-vins.
- Autres accessoires : Mettre à disposition un équipement complet avec par exemple des serviettes, des stop-gouttes pour verser le vin sans éclaboussures, des bouchons et pompes à vides pour conserver la fraîcheur des vins qui ne seront pas terminés, des aérateurs pour intensifier l’oxygénation du vin ou encore des carafes et décanteurs pour aérer certains vins.
Echantillons et fiches techniques
Préparation des échantillons de vin
Avant tout, il est important de choisir judicieusement les vins qui seront présentés lors de la dégustation. Cette sélection doit refléter la diversité du domaine, incluant différents cépages, millésimes, ou styles de vinification, selon le thème de la dégustation.
Les bouteilles doivent être ouvertes quelques heures avant la dégustation pour permettre aux vins de s'aérer, surtout dans le cas des vins rouges plus complexes qui bénéficient de l'oxygénation. Les vins plus délicats, comme certains blancs ou rosés, requièrent moins de temps.
Il faut également calculer la quantité de vin nécessaire en fonction du nombre d'invités et du nombre de vins à déguster. Habituellement, une quantité de 50 ml par vin et par personne est suffisante pour goûter sans excès. Avant de servir, chaque échantillon doit être vérifié pour s'assurer qu'il n'y a pas de défauts (bouchon, oxydation, température…). Pour limiter le gaspillage et optimiser le nombre de bouteilles utilisées pour la dégustation, il existe des solutions qui permettent de garder un vin plusieurs jours sans altération (Coravin, pompe à vide…).
Création des fiches techniques
Comme expliqué ci-dessus, chaque fiche technique doit inclure le nom du vin, le cépage, le millésime, et l'origine géographique. Ces informations fournissent un contexte essentiel sur chaque échantillon. Elles doivent être claires, faciles à lire et esthétiquement plaisantes. Elles peuvent également inclure le logo du domaine et une photo du vignoble ou de la bouteille, renforçant ainsi l'image de marque et l'expérience immersive.
Une fiche technique de vin contient également le processus de vinification utilisé, y compris toute particularité comme l'élevage en fût de chêne, la fermentation en cuve inox ou des techniques spéciales. Les notes détaillées sur l'aspect visuel, les arômes et les saveurs du vin doivent également y figurer. Cela peut inclure des descriptions des fruits, des épices, des herbes, ou des nuances minérales et boisées, aidant ainsi les dégustateurs à identifier ces caractéristiques pendant qu'ils goûtent.
Conseils de garde et d'accord mets-vin : Indiquez sur vos fiches le potentiel de garde du vin et proposez des suggestions d'accords mets-vins qui complètent ou mettent en valeur ses caractéristiques.
Le processus de dégustation
Voici les étapes à suivre pour une dégustation réussie :
1. Accueil des participants : Un accueil chaleureux, souvent accompagné d’une brève introduction au domaine et à son histoire, établit le ton de l'événement. C’est aussi le moment de distribuer les fiches techniques et de donner un aperçu du déroulement de la dégustation.
2. Présentation du thème et des vins : Avant de commencer, le vigneron devrait expliquer le thème de la dégustation et présenter brièvement chaque vin qui sera dégusté. Cette introduction peut inclure des informations sur les particularités de chaque millésime, les techniques de vinification spéciales, ou les distinctions que les vins ont reçues.
- Regarder : Examiner la clarté, la couleur, et la viscosité du vin. La couleur peut donner des indices sur l’âge et la concentration.
- Agiter : Faire tourner le vin dans le verre pour l’aérer, ce qui libère les arômes.
- Sentir : Inspirer profondément pour percevoir les arômes primaires (fruits), secondaires (vinification) et tertiaires (vieillissement).
- Goûter : Prendre une gorgée, laisser le vin couvrir la langue pour détecter les saveurs de base (doux, salé, acide, amer) et la texture.
4. Discussion et évaluation : Après la dégustation de chaque vin, il est enrichissant d'encourager une discussion parmi les participants pour partager leurs impressions et ressentis. Cela peut aider à comprendre les différentes perceptions et préférences. Le vigneron peut également répondre à des questions et fournir des détails supplémentaires sur la vinification ou le terroir.
5. Rincer et répéter : Entre les vins, il est conseillé de rincer les verres avec un peu d’eau, ou d’utiliser un nouveau verre pour chaque type de vin, afin d'éviter les interférences de saveurs.
6. Clôture de la dégustation : En fin de séance, remerciez les participants pour leur présence et leur intérêt. C'est aussi l'occasion de proposer une visite du domaine ou de la cave, ou de discuter des options d'achat ou de commandes futures.
7. Feedback : Recueillir les impressions et commentaires des invités après l’évènement peut fournir des informations précieuses pour améliorer les futures dégustations et ajuster les stratégies de production ou de marketing du vignoble. Grâce à l'option Relation Client du logiciel ISAVIGNE, vous pouvez communiquer efficacement avec tous vos invités :
Que dit la loi ?
Avant la dégustation : les formalités à anticiper
En tant que vigneron, vous disposez forcément d’un statut d’entrepositaire agréé. Cela tombe bien : il vous permet non seulement de vendre vos vins, mais aussi de les faire déguster gratuitement à la propriété, sans formalité préalable.
Attention : cet avantage implique quelques conditions.
Il ne s’applique que :
- Pour des vins de propriété, c’est à dire issus de votre propre récolte. Pour faire déguster des vins de négoce dans votre exploitation, vous pourriez avoir besoin d’une licence. Votre mairie pourra vous renseigner sur ce point. De même, faire déguster les vins de confrères nécessitera très probablement une licence.
- Sur place. Tous locaux séparés de votre exploitation ne bénéficient pas de cet avantage. Ex : une boutique que vous possédez dans le village.
- Si la dégustation est gratuite. Quand la dégustation est payante, cela change tout : vous êtes considéré par la loi comme « débitant de boissons » et avez besoin d’une licence.
Cette fameuse licence est à demander à votre municipalité. La licence III suffit pour des produits titrant en dessous de 18 %. Mais le nombre de licence III est contingenté. Il peut donc être nécessaire de se procurer une licence IV . Celle-ci peut être achetée auprès d’autres professionnels.
En tant qu’établissement proposant des dégustations à un public de visiteurs, vous êtes considéré comme un établissement recevant du public (ERP). Il faut donc faire le nécessaire pour que votre caveau soit accessible aux personnes en situation de handicap.
La publicité pour vos dégustations est autorisée, dans les limites de la loi Évin bien sûr, et sur les supports qu’elle autorise : internet, affiches et presse.
Pendant la dégustation : Les règles à respecter
Certaines règles logiques s’appliquent lors d’une dégustation au domaine. Ainsi vous ne pouvez évidemment pas servir les femmes enceintes, ni les mineurs. Concernant ces derniers, il est interdit de les recevoir sans la présence d’un adulte. Dans ce cas, Vin et Société recommande un lieu à part pour eux, ou ils pourront, par exemple, déguster des boissons sans alcool.
Il relève de votre responsabilité de proposer des quantités limitées afin d’éviter la consommation excessive d’alcool. À ce titre, les personnes visiblement en état d'ébriété ne devront pas être servies. Offrir de l’eau et quelques aliments solides (pain) peut prévenir certains problèmes de santé. De même, proposer crachoirs et éthylotests est un vrai plus, sécurisant pour vous comme pour les personnes qui dégustent.
Si vous proposez de la petite restauration pour accompagner les vins, il vous faudra respecter les normes d’hygiène et de sécurité alimentaires : indication des allergènes, nettoyage et désinfection des locaux… D’autant plus si la dégustation est payante. Le recours à un traiteur peut simplifier bien des choses.
Attention à la comptabilité matières : les vins proposés à la dégustation sont considérés comme des sorties de propriété.
🔔 "Les erreurs à éviter"
Pour que cet événement soit réussi, il y a certaines erreurs à éviter. L'ambiance et l'environnement où se déroule la dégustation doivent être soigneusement contrôlés. Un espace bruyant, désordonné ou mal éclairé peut distraire les dégustateurs et altérer leur capacité à apprécier les vins.La température à laquelle un vin est servi peut fortement influencer sa saveur et son arôme. Servir un vin blanc trop froid peut masquer ses nuances, tandis qu'un vin rouge trop chaud peut sembler alcoolisé et déséquilibré.Attention également au nombre de vins présentés. Proposer une grande quantité de vins lors d'une seule dégustation peut submerger les palais des invités et les empêcher de se souvenir des caractéristiques spécifiques de chaque vin. Il est préférable de limiter le nombre de vins à un nombre gérable, en se concentrant sur la qualité de l'expérience plutôt que sur la quantité. Il ne faut généralement pas dépasser 6 vins différents pour une dégustation de qualité.Ne pas demander ou ignorer les retours des participants après l'événement est une opportunité manquée de s'améliorer. Recueillir des commentaires peut aider à affiner les futures dégustations et à mieux comprendre les attentes des visiteurs .
Réputée chronophage, la dégustation à la propriété peut devenir un véritable atout si elle est bien organisée. Elle peut d’abord représenter un revenu en soi lorsqu’elle est payante. C’est aussi une opportunité unique de vente directe, en particulier dans les zones de fort passage, comme les régions touristiques. D’après Atout France, plus d’une dégustation à la propriété sur deux mène à un achat de vin.
Pour s’assurer de l’efficacité commerciale de la dégustation sur place, mieux vaut la considérer comme une activité à part, et comptabiliser son chiffre d’affaires (revenus des prestations payantes, ventes directes) ainsi que ses coûts (main d’œuvre, frais divers) afin d’effectuer un bilan chiffré chaque année.
Mais l’intérêt va bien au-delà du gain immédiat : en rencontrant vos clients, vous créez un lien commercial fort avec eux. Vous pourrez ainsi les fidéliser (via les réseaux sociaux, ou le mailing), voire en faire des ambassadeurs de votre marque, en France comme à l’étranger ! Un aspect difficilement quantifiable, mais essentiel dans le monde du vin au sein duquel l’image reste primordiale.
